Les virus prennent-ils leur retraite?

15 avril 2020
Jean-François Cliche, Le Soleil

Front view of doctor holding torn paper with coronavirus Free Photo

Q : « L’expérience de la COVID-19 nous indique que ce virus vivrait dans le corps humain durant environ 14 jours. Toutefois, durant les derniers jours de sa vie (entre 10 et 14 jours), le virus est-il toujours aussi contagieux ou est-il trop faible pour se transmettre efficacement? S’il est aussi contagieux et qu’il migre vers une autre personne, reprend-il des forces de sorte qu’il prendra un autre 14 jours à mourir de sa belle mort », demande Claude Gingras, de Québec.

R : Les virus ne « vieillissent » pas à proprement parler — en fait comme je l’écrivais dans une chronique récente, ils ne sont même pas vraiment vivants de toute manière.

Ce qui arrive à un virus quand il entre dans le corps, c’est qu’il va aller infecter une cellule, dans laquelle il va « injecter » son matériel génétique, pour ainsi dire. Le reste (l’enveloppe et les protéines) demeure hors de la cellule, ce qui implique que le virus est essentiellement détruit par le procédé.

Cependant, à ce stade, le virus a déjà atteint son but : une fois que son génome est entré, il va rejoindre le noyau cellulaire, ce qui va ensuite contraindre la cellule à produire des copies de virus. « Pour des virus comme les coronavirus et d’autres sortes aussi, il faut généralement 3 ou 4 heures avant que de nouveaux virus commencent à sortir de la cellule infectée », dit Pierre Talbot, chercheur à l’Institut Armand-Frappier (INRS) et spécialiste des coronavirus. Et ces nouvelles copies vont alors infecter d’autres cellules, qui produiront d’autres copies encore, et ainsi de suite.

C’est donc dire que les virus qui « sautent » d’une personne A à une personne B ne sont pas « plus vieux » que lorsque la personne A a été infectée : ce sont juste les « descendant s» de ces virus-là, séparés par plusieurs « générations ». Et ils ne sont certainement pas en moins bonne forme.

La période d’isolement de 14 jours qu’on impose à certaines personnes vise plutôt deux choses. D’abord, pour les personnes qui pourraient avoir été en contact avec la maladie, l’idée est de laisser passer ce qu’on appelle la « période d’incubation » — soit l’intervalle entre le moment où une personne est infectée et le moment où elle commence à présenter des symptômes. Dans le cas de la COVID-19, il faut généralement autour de 5 jours avant que des symptômes (toux, fièvre, etc.) apparaissent, mais on craint que la maladie ne puisse être transmise même par des gens asymptomatiques. Et il existe des cas (rares, mais quand même) de gens qui ont fini par développer des symptômes qu’après deux semaines. Donc au bout de 14 jours, on est raisonnablement certain que ces gens-là n’ont pas le virus.

Ensuite, en ce qui concerne les personnes qui ont passé le test et qui ont effectivement la COVID-19, l’isolement de 14 jours vise à laisser passer les symptômes, et donc la période pendant laquelle elles sont le plus contagieuses. C’est généralement assez long pour que le système immunitaire vainque le virus — mais cela peut varier d’une personne à l’autre et ces gens-là doivent surveiller leurs symptômes pour savoir quand ils peuvent mettre fin à leur isolement [voir recommandations].

La COVID-19 suscite énormément de questions. Afin de répondre au plus grand nombre, des journalistes scientifiques ont décidé d’unir leurs forces. Les médias membres de la Coopérative nationale de l’information indépendante (Le Soleil, Le Droit, La Tribune,  Le Nouvelliste, Le Quotidien et La Voix de l’Est), Québec Science et le Centre Déclics’associent pour répondre à vos questions. Vous en avez? Écrivez-nous. Ce projet est réalisé grâce à une contribution du Scientifique en chef du Québec, qui vous invite à le suivre sur Facebook, Twitter et Instagram et du Laboratoire de journalisme de Facebook.

Avec le soutien du Réseau de l’Université du Québec et des Fonds de recherche du Québec.